Jean Snella

16/02/2025

Jan Snella est né le 9 décembre 1914 à Mengede (de nos jours quartier de Dortmund).

Ses parents sont originaires de Grande-Pologne. Comme beaucoup de Polonais à l’époque, ils avaient émigré en Westphalie où son père Franciszek était devenu mineur. Au début des années 1920, la famille vient s’établir Cité Bruno à Dourges, dans le bassin houiller du Pas-de-Calais (elle sera bizarrement recensée sous le nom de Snèla). À 14 ans, Jan devient apprenti ajusteur pour la Compagnie des mines de Dourges où son père travaillait depuis son arrivée en France. Le jeune Jan devient ensuite mécanicien dans la Compagnie Arrageoise de transport public.

Il va commencer à jouer au football dans des clubs locaux (Hénin-Liétard et Arras). Par naturalisation, il opte pour la nationalité française. Jan devient Jean. Il devance l’appel sous les drapeaux et durant son service militaire il va gagner par trois fois le championnat de France militaire. Dans le civil, ses prédispositions pour le football lui ouvre tout naturellement les portes du grand club du Nord, l’Olympique Lillois (l’ancêtre du LOSC) qui vient de remporter la première édition du championnat de France de football professionnel en 1933. Après quatre années de bons et loyaux services, il accepte la proposition des dirigeants stéphanois et en 1938, il vient renforcer une équipe de l’AS Saint-Étienne qui vient d’obtenir son ticket pour jouer en Première Division. Il a vingt quatre ans et tout l’avenir devant lui. Son acclimatation est remarquablement rapide malgré son épouvantable accent “ch’timi” qui pouvait lui donner bien du fil à retordre lorsqu’il s’agissait de se faire comprendre dans une région où régnait un autre accent quasiment aussi prononcé. Snella était une personne réservée. Néanmoins, il est attiré par la gentillesse et la disponibilité des Stéphanois, mineurs de fond comme l’a été autrefois son père ce qui explique certainement que le courant est aussi bien passé entre eux.

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                                                                                       ASSE - Saison 38-39

La Seconde Guerre mondiale a brutalement fait irruption dans la vie de Snella et va mettre un frein brutal à son ascension : il combat contre la Wehrmacht lors de l’invasion du Nord de la France et est fait prisonnier en juin 1940 dans l’Eure, du côté d’Évreux. Envoyé dans un camp de prisonniers, il réussit à s’en échapper en 1942 et à passer la ligne de démarcation d’où il rejoint Saint-Étienne. La période n’est cependant pas des plus propices à la pratique du football de haut niveau d’autant que le gouvernement de Vichy décide en 1943 purement et simplement de supprimer le professionnalisme.

Durant la saison 1945/46, Snella va rechausser les crampons pour l’ASSE, tout en payant de sa poche des cours d’entraîneur. Handicapé par des douleurs aux dos récurrentes et par des genoux privés de leurs deux ménisques, il est contraint de mettre un terme à sa carrière de joueur en 1946. Une nouvelle vie commence pour lui, celle d’entraîneur, un choix de vie qui va l’emmener vers les sommets avec une seule idée : un football en mouvement pour un seul et unique but, l’offensive.

En tant qu’entraîneur, Jean Snella s’est d’abord chargé du FC Lorient. Mais dès 1948, il va entraîner le onze amateur puis les professionnels de l’AS Saint-Étienne. Il restera à son poste jusqu’en juin 1958, après avoir mené cette équipe à son premier titre de champion de France en 1957.

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ASSE- Entraîneur dans les années 1950

Durant la Coupe du monde 1958 en Suède, il est l’adjoint du sélectionneur national Albert Batteux. Au début, personne ne croit en leur chance mais Jean Snella va mettre sur pied une préparation physique en tous points remarquable. Contre toute attente, la France termine 3e de la compétition !
*Quelques années plus tard, en septembre 1966, pour rendre service à la Fédération française de football qui se retrouvera sans sélectionneur-entraîneur, en tandem avec José Arribas, il va accepter le poste de sélectionneur-entraîneur de l’équipe nationale durant quatre mois. Au total, ils dirigeront 4 matchs.

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Au début de la saison 1958/59, Snella part sous d’autres cieux pour des raisons personnelles et atterrit sur les bords du lac Léman où il va gagner par deux fois (1961 et 1962) le titre de champion de Suisse avec le Servette de Genève.

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1961 - Champion de Suisse

En 1963, le nouveau président du club stéphanois Roger Rocher va le convaincre de revenir et Snella va contribuer non seulement à rapidement mener le néo-promu à son deuxième titre de champion de France (1964) mais aussi à construire un onze composé de jeunes talents qui régneront sur le football tricolore durant une décennie et demi (rappelez-vous ! Bereta, Mitoraj [tous deux d’origine polonaise], Bosquier, Herbin, Jacquet…). Suite au troisième titre des Verts lors de la saison 1966/67, Snella va quitter l’ASSE. Jusqu’en 1971, il entraînera à nouveau le Servette, décrochant la Coupe de Suisse lors de sa dernière année dans ce pays.

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Avec le président de l'ASSE, Roger Rocher Sur le terrain, en 1964

Il prend ensuite en main l’OGC Nice jusqu’en 1974 pour conduire le club méditerranéen au rang de vice-champion en 1973. Après quoi, il part entraîner durant deux saisons le club algérien de l’Olympique Nasr Atletic d’Hussein Dey où il laissera le souvenir d’’un homme très sage qui savait parler à ses joueurs et qui faisait tout pour les mettre dans les meilleurs conditions de jeu : “Il cirait même les ballons avec une pâte qu’il achetait lui-même”. 
À la fin de sa longue et glorieuse carrière, il travaillera pour le FC Metz.

Il décède des suites d'un cancer dans la nuit du 19 au 20 novembre 1979, à la clinique Claude-Bernard, à Metz.

Il restera comme l'un des entraîneurs français les plus marquants de l'après-guerre. Raymond Kopa dira de lui : “Il était le football”. C'était vraiment “Monsieur Snella”, comme on disait à l'époque ! Il ne haussait jamais le ton, préférant, en parfait maître d’école qu’il aurait aimé devenir, transmettre sa vocation et son savoir-faire. En échange, il demandait une totale implication. Il connaissait la valeur du mot travail. Il fut l’un des premiers à comprendre l’importance de la musculation, de la diététique et de la récupération.
Il a été élu entraîneur français de l’année en 1964 en recevant l’“Oscar Byrrh” et de nouveau en 1972 par le magazine “France Football”. 
La tribune sud du Stade Geoffroy-Guichard à Saint-Étienne ainsi que la rue menant au stade portent son nom.

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Line Renaud remet l'Oscar Byrrh à Jean Snella