Collectif Polonia des Hauts-de-France

KAZIMIERZ FUNK

22/02/2025

Kazimierz Funk est né le 23 février 1884 à Varsovie (à l’époque sous occupation de l’Empire russe). Il deviendra un biochimiste de renommée mondiale après avoir mis en évidence la première vitamine. Enfant, il souffre d’une malformation congénitale : une dysplasie de la hanche. Ses parents médecins vont l’envoyer dans une clinique près d’Augsbourg en Allemagne pour un traitement orthopédique. Il en revient avec un appétit aiguisé pour les études et une connaissance courante de la langue allemande. Après des études secondaires à Varsovie, il obtient son baccalauréat en 1900. Il a 16 ans et du talent !
Durant l’automne, il part pour la Suisse. D’abord à Genève - pour étudier la biologie, puis à Berne - la chimie. C’est là que, sous la direction du chimiste polonais Stanisław Kostanecki, le jeune Kazimierz va mener des recherches sur la synthèse de l'œstrogène (hormone sexuelle secrétée par l’ovaire), qui se termineront avec l'obtention d'un doctorat en chimie organique. Il a 20 ans et a acquis de solides compétences !
Après avoir décroché son diplôme, il travaille à l'Institut Pasteur à Paris où de 1904 à 1906, en coopération avec Gabriel Bertrand, le chef du service de biologie, il réalisera la plupart de ses recherches qu’il poursuivra ensuite à l'Université de Berlin (1906-1910) où il observe les effets de l'alimentation du chien et commence déjà à deviner qu’en plus des protéines, des graisses, des glucides et des minéraux, il y a autre chose en plus dans l’alimentation. Il sera également biochimiste à l’hôpital municipal de Wiesbaden où, entre autres, il va créer une microméthode pour estimer de très petits éléments dans les organismes, notamment dans le sang.

Il travaille ensuite à l'Institut Lister à Londres (1910-1913) où il va angliciser son prénom en Casimir. C’est là qu’il publie son premier article en anglais (sur la synthèse de la dihydroxyphénylalanine - communément appelée DOPA). Ses nombreuses expérimentations vont le conduire à réaliser qu’il existe dans les aliments des substances indispensables à un bon équilibre. Il a en effet constaté que plusieurs maladies peuvent se guérir et être évitées par l’introduction dans l’alimentation de composés organiques contenant certains corps chimiques. En 1912, il va parvenir à isoler, à partir de la pellicule de son qui enveloppe le riz, une substance cristalline et hydrosoluble qu’il nommera vitamine (contraction du mot latin vita - vie et amine - composé azoté), voulant ainsi signaler que les composés organiques aminés se révèlent, même à l’état de traces, indispensables à la vie. Cette première vitamine, appelée plus tard thiamine ou vitamine B1, permettra de prévenir et de guérir le béribéri, maladie provoquant troubles neurologiques (dans les cas graves, le malade ne peut ni marcher ni même se lever) et insuffisance cardiaque (pouvant rapidement avoir une issue fatale). Cette maladie sévissait à l’époque dans les pays d’Asie où les populations se nourrissaient principalement de riz décortiqué et étaient souvent atteintes de paralysies, lesquelles régressaient dès qu'elles étaient sustentées par du riz entier. Funk venait de prouver que la vitamine était responsable du fonctionnement de divers processus physiologiques indispensables à la vie et au développement des êtres humains et des animaux. Déjà à ce moment-là, il est bien conscient que sa découverte n’allait pas élucider qu’une seule maladie. Des recherches ultérieures sur la carence en vitamine démontreront que cette carence peut provoquer un certain nombre d’autres maladies comme le rachitisme, le scorbut, la pellagre, l’anémie, l’ostéomalacie, la sprue. Sa découverte sera une étape primordiale dans le traitement de la nutrition et dans l'importance d'une alimentation équilibrée.Dans les années 1913-1915, Funk mène ensuite des recherches à l'hôpital oncologique de Londres (Institute of Cancer Research) où ses investigations démontrent qu’il pourrait exister un certain lien entre régime alimentaire et cancer…

Le 18 février 1915, il va quitter l’Europe en guerre pour les États-Unis. C’est au Harriman Research Laboratory de New York qu’il fera des recherches sur l'utilisation des vitamines à des fins médicinales. Les conditions de travail y sont comme à Londres - primitives. Ses finances sont instables. Sa santé se détériore. Il poursuit ensuite ses recherches au sein de la Calco Chemical Company, à Bound Brook (New Jersey), puis de l'entreprise pharmaceutique Metz and Company à partir de 1917. Il améliore un médicament qui combat l'épidémie de syphilis. Par ailleurs, un concentré de vitamines provenant du foie de morue est désormais disponible sur le marché : « Oscodal », C’est le premier produit vitaminé accepté par l'American Medical ! La production d'adrénaline synthétique commence aussi.. L'ambition du scientifique croît en proportion directe avec le solde de son compte bancaire.

En 1920, il va acquérir la citoyenneté américaine. Dans le passé, il aurait pu accepter la nationalité allemande, ce qui aurait pu accélérer sa carrière scientifique. À chaque fois, il avait souligné qu'il était un Polonais avant tout.

En 1923, après avoir obtenu une subvention de la Fondation Rockefeller, il retourne, avec son épouse et son fils, dans sa patrie de nouveau indépendante, où il va diriger à Varsovie le département de biochimie d’un tout nouveau centre de recherche : l’Institut national d'hygiène, créé par le nouvel État polonais en raison de la situation épidémiologique pauvre et la diffusion d’épidémies de typhus exanthématique, de typhoïde, de choléra, de tuberculose, de dysenterie et d'autres maladies infectieuses dans le pays en reconstruction. Là, il commencera à travailler sur les hormones, principalement dans le but d'isoler l'insuline dont il achètera le matériel de production de ses propres deniers. La Pologne devient ainsi le troisième producteur mondial de cette hormone.

Dédicace de Kazimierz Funk datant de janvier 1956 “pour la bibliothèque de l’Institut national d’hygiène de Varsovie en souvenir de ma collaboration 1923-1927”

Bien évidemment, Funk a joué un rôle important dans le lancement de la science de la nutrition en Pologne. Durant son séjour dans le pays, il aura l’occasion de participer à de nombreux congrès (Copenhague, Malmö, Bucarest, Lwów, Stokhholm, Moscou, Léningrad où il aura l’occasion de rencontrer le lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine de 1904, Ivan Pavlov). Le développement de sa recherche implique des voyages à travers le pays qui vont se terminer pour lui avec une sévère pneumonie.
Son contrat avec l’Institut s’étant achevé en 1927 et trouvant la politique du pays instable, il part pour la France où il se lie avec une firme pharmaceutique qui produit des sérums et des vaccins et plus tard il fonde son propre institut privé de recherche - Casa Biochemica - qu’il a fait construire à Rueil-Malmaison, à la périphérie de Paris. Pendant son séjour en France, il va principalement mener des recherches sur les hormones, sur l'insuline et sur le diabète ainsi que sur les extraits liquides de foie, à l’époque seuls traitements contre l'anémie pernicieuse.

Kazimierz Funk dans son laboratoire - Années 1950

Après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, la famille Funk (Kazimierz ; son épouse Alix Denise - née Schneidesch à Bruxelles en 1895 ; leur fils Ian Casimir, né en 1915 à New York ; leur fille Doriane Jacqueline, née en 1924 à Gdańsk) retourne aux États-Unis le 5 octobre 1939. Kazimierz commence à travailler pour la United States Vitamin Corporation. Il y poursuivra ses recherches sur les possibilités thérapeutiques d’utilisation des hormones sexuelles, de l'insuline et des extraits de foie. Il va aussi trouver une corrélation entre l'alimentation et les risques de cancer chez l’être humain. Il deviendra conseiller d'un certain nombre d'institutions dans les différents domaines de la biochimie et à partir de 1947 président de la “Fondation Funk pour la recherche médicale” créée spécialement pour lui. Il développe une théorie sur les interrelations entre vitamines et minéraux. Cela va le conduire avec le Dr Harry Ennis Dubin à mettre sur le marché un produit connu sous le nom de « Vi-Syneral ».

Dans la dernière période de sa vie, il va étudier les causes du cancer. Il va mourir à l’âge de 83 ans le 19 janvier 1967 à Albany (New York). Il faut signaler que durant toutes ces années passées à l’étranger, non seulement il n’a jamais renoncé à sa nationalité polonaise, mais qu’en plus il a toujours souligné sa polonité.

Tout au long de sa carrière, Kazimierz (Casimir) Funk a écrit des centaines d’articles dans de nombreuses revues scientifiques, mais aussi quelques livres dont : « The Etiology of Deficiency Diseases/L'étiologie des maladies de carence » (1912) - où pour la première fois fut introduit le terme “vitamine” - et « Die Vitamine » (1913) qui sera ensuite traduit en plusieurs langues. Ses recherches ont révolutionné de nombreux domaines de la médecine, allant de l'oncologie (recherches des causes de la croissance rapide du tissu tumoral), passant par la diabétologie (recherches sur l'isolement de l'insuline, hormone secrétée par le pancréas et responsable de la régulation de l’apport en hydrocarbure), jusqu’à la vitaminologie (dont il est mondialement reconnu comme le père spirituel). Il a également le premier isolé l’acide nicotinique (vitamine B3) et a permis la découverte de 13 vitamines fondamentales, réparties en 2 catégories.
Les premières, liposolubles, au nombre de 4, sont les vitamines A (antixérophtalmique), D (antirachitique), E (de reproduction) et K (antihémorragique) ; elles sont associées aux matières grasses des aliments. Dans l'organisme, elles sont stockées au niveau du foie et du tissu adipeux, avant d'être libérées petit à petit selon nos besoins : il n'est donc pas nécessaire de les consommer tous les jours. Si le risque d'hypervitaminose existe, consommer l'une de ces vitamines en excès reste rare.
Les secondes, hydrosolubles, au nombre de 9, sont les 8 vitamines du complexe B : la thiamine (B1), la riboflavine (B2), la niacine (B3), la pyridoxine (B6), l'acide folique (B9), la cyanocobalamine (B12), l'acide pantothénique et la biotine) et la vitamine C (acide ascorbique). Ne pouvant pas être stockées, elles doivent être consommées régulièrement.

Grâce à tous ses travaux fondamentaux qui vont profondément modifier les méthodes thérapeutiques usitées jusqu’alors, les vitamines constituent aujourd’hui le traitement incontournable des maladies dues à des carences alimentaires.

Funk pourrait être qualifié de “scientifique voyageur” car, nous l’avons vu, il a vécu et travaillé dans de nombreux endroits et plusieurs pays. Sa parfaite connaissance du polonais, du russe, de l'allemand, du français et de l'anglais l’aura sûrement aidé dans ses pérégrinations…

 Kazimierz Funk fut proposé quatre fois mais il ne reçut jamais le Prix Nobel pour son travail. Cependant, l’Institut polonais des arts et des sciences aux États-Unis attribue chaque année le Prix Casimir Funk (Casimir Funk Natural Sciences Award) à un scientifique américain d’origine polonaise.

Pour ses contributions au domaine de la nutrition, il a été intronisé à titre posthume au Nutrition Hall of Fame.

Ses contributions à la nutrition et à la médecine ont aidé l’humanité à vaincre des maladies comme le scorbut et ont ouvert plusieurs autres portes à de nouvelles découvertes scientifiques. Aujourd’hui, le grand public s’est approprié les vitamines, synonymes de santé, de bien-être et de tonus.

*En 2007, des musiciens américains fondent le groupe “Casimir Funk”. Ils jouent du rock et du blues…

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